Interview de Simon Casse et Xavier Cugat après les Mondiaux juniors

27 septembre 2023  //  
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L’Équipe de France juniors a été étincelante lors des Mondiaux U22 à Druskininkai en Lituanie. Du 12 au 17 septembre, les Tricolores ont récolté cinq médailles dont trois titres. Mathis Rochat a été champion du monde en individuel. Avant cela, l’athlète du RMA a glané l’or en relais avec Émilien Maire. Ils ont été aussi sacrés par équipes avec Léo Bories 3e en individuel. Les athlètes féminines ont également réussi ces Championnats du monde avec la médaille de bronze de Louison Cazaly et une 5e place par équipes. La FFPM a pu échanger avec les deux entraîneurs de ce beau collectif, il s’agit de Simon Casse et Xavier Cugat.

Vous avez eu les athlètes à tour de rôle en stage avant de partir en Lituanie. Simon à Font-Romeu puis Xavier à Bordeaux. Comment la préparation s’était passée et est-ce que vous aviez de bons indicateurs sur leurs futures performances ?

Simon CasseOui, ils étaient très impliqués dans le projet. On sentait vraiment une équipe professionnelle dans tous les aspects. Ils ont bien vécu ensemble pendant toute cette préparation que ce soit avec les Seniors à Font-Romeu ou seuls à Bordeaux. C’était un groupe très facile à vivre et à entraîner. Ils se sont beaucoup investis dans le parcours d’obstacles. On a réalisé quelques sessions à Perpignan chez Laurent Puigsegur et c’était très intéressant, ils ont beaucoup progressé grâce à ces séances.

Xavier Cugat –  Ils se dispersent quelques fois en dehors des entraînements, mais dès qu’ils arrivent aux entraînements ils savent pourquoi ils sont là, ils ne s’éparpillent pas. Ils ont leurs routines, ils ont leurs objectifs. Ils font attention à tout, notamment à la récupération et à ce qu’ils prennent à côté. Ce sont des juniors mais ils sont déjà dans une démarche professionnelle. Comme l’a dit Simon, ils vivent vraiment bien ensemble. Lorsqu’on discute avec les athlètes des autres pays, ils sont un peu jaloux de cette cohésion car dans les autres nations ce n’est pas toujours le cas. Nos jeunes sont très soudés, ils se soutiennent tous même lors des épreuves individuelles, ils forment une équipe.

S.C – Parfois à la limite du raisonnable. Par exemple, ils ont raté l’avion au retour des Championnats d’Europe (U22 à Istanbul en juin dernier) parce qu’ils étaient tous ensemble, ce n’est pas un secret ce qu’il s’est passé. Ils flirtent souvent avec les limites mais ils gardent en général un comportement professionnel.

Dans ces situations, vous êtes là pour les recadrer et au vu des résultats, votre message passe bien.

S.C – On essaie !

X.C – Ils sont à l’écoute des coachs, une réflexion et ils repartent tout de suite dans ce qu’ils doivent effectuer, on n’a pas besoin de batailler.

Vous aviez fixé des objectifs avant d’aller en Lituanie ?

S.C – Non, on savait qu’après les Championnats d’Europe en connaissant l’équipe, en tout cas pour les garçons, on avait des clients pour obtenir de bons résultats. Trois des quatre athlètes masculins étaient dans leur dernière année juniors et ont fait toutes les sélections. Ils ont pas mal d’expérience et au fil des années ils ont progressé. Après, au pentathlon, les résultats ne peuvent pas être écrits avant d’avoir franchi la ligne d’arrivée donc c’est difficile de parler d’objectif. Au final, les Mondiaux se sont bien déroulés, ils ont performé sur le plan individuel et collectif, c’est génial.

Dès le premier jour, Mathis Rochat et Émilien Maire sont devenus champions du monde en relais. Est-ce que ça a aidé mentalement certains athlètes à se libérer ou ce titre a renforcé encore plus la cohésion du groupe ?

X.C –  La cohésion pas forcément. Ils sont déjà très soudés. Après, c’est sûr que lorsque tu obtiens une médaille d’or en début de semaine, la compétition est parfaitement lancée, tu as envie de réussir comme les autres, cela peut être un tremplin et cela crée une bonne dynamique.

S.C – Cette performance montre aux autres qu’un grand résultat est atteignable. Parce que je pense qu’ils ne se considéraient pas plus forts que les autres. Chacun peut alors se dire qu’il peut gagner, tout le monde est tiré vers le haut. Ce résultat a lancé vraiment une excellente dynamique pour l’Équipe de France pour la semaine, c’était une entame idéale.

 

Ils ont été excellents sur quasiment toutes les épreuves (meilleur temps au parcours et de la natation, 2e chrono du Laser Run), l’entame était toutefois un peu plus compliquée avec une 8e place en escrime. Quels ont été vos mots après ce début de relais ?

X.C – Pas forcément, ils effectuent une escrime correcte par rapport à ce qu’on a l’habitude de réaliser en relais. Dès le départ ils étaient concentrés. On se dit que la journée va être bonne et comme l’a souligné Simon avec ce qu’ils avaient fait Perpignan, ils étaient extrêmement en confiance sur le parcours.

S.C – Lors du relais, l’épreuve d’obstacles est vraiment déterminante. C’est là qu’ils ont construit leur titre et pour parfaitement finir avec le Laser Run.

 

Est-ce que c’était facile à coacher car ils ont été très performants après l’escrime ?

 

S.C –  Ce n’était pas simple parce qu’Émilien s’est tordu la cheville un peu bêtement lors de l’échauffement général (après l’escrime).

X.C – Il s’est tordu la cheville sur un trottoir.

S.C – On était un peu dans l’expectative, on ne savait pas trop comment cette blessure allait évoluer. Il a serré les dents, il s’est concentré à nouveau et on a pu profiter de la collaboration de l’équipe allemande notamment de son kiné avec qui on entretient de bonnes relations. Ils nous ont aidé, ils l’ont strappé et derrière il a pu se concentré sur ce qu’il avait à faire et être performant. Mais je pense qu’il a perdu un peu d’influx avec cet incident.

 

Est-ce que cette blessure l’a gêné pour les qualifications et pour la finale où il termine à une belle 7e place et surtout avec le titre par équipes ?

X.C – Je pense que cette torsion à la cheville l’a gêné, il a perdu de l’énergie. Il s’est fait un peu peur, il était un peu sur la retenue, je pense que malgré cela, il a réussi de très bons Mondiaux.

 

Après ce relais doré, l’équipe est en confiance. Et puis tout se déroule au mieux lors des qualifications où vos sept athlètes se qualifient tous pour les finales (Audrey Tchirikhtchian, Morgane Sauvy, Louison Cazaly, Melvin Perrier, Léo Bories , Émilien Maire et Mathis Rochat).

 

X.C – C’est très rare, il ne faut pas croire que c’est facile de mettre 100 % des athlètes en finale. Il y a en plus le parcours d’obstacles cette année.

S.C – Par rapport au parcours, Morgane et Audrey ont eu un peu de mal. Mais j’ai surtout vu que le groupe se tirait vers le haut. En tant que coach, on a essayé de les rassurer et de leur prodiguer des conseils, mais leurs coéquipiers également, car eux pratiquent le parcours et connaissent réellement sa difficulté. Tout le monde s’est entraidé, c’était top. En fin de compte, ils se sont tous qualifiés en finale, ils ont réussi de superbes performances.

 

Est-ce qu’il y a eu des instructions avant les finales individuelles par exemple concernant Morgane et Audrey qui avaient rencontré des difficultés sur le parcours d’obstacles ?

 

S.C – Elles se sont faites éliminées sur le parcours d’obstacles donc elles avaient marqué 0 point. La consigne était de se concentrer et d’achever le parcours et non pas de chercher le meilleur temps à tout prix. Elles ont pu le faire à l’entraînement, on essayait de leur apporter de la sérénité pour finir le parcours sans faute et marquer des points. Contrairement aux garçons et à Louison qui était beaucoup plus à l’aise, son objectif était clairement de gagner du temps par rapport à ses concurrentes directes.

X.C –  Pour les filles, avant de parler de vitesse, il fallait finir le parcours car on jouait aussi un bon classement par équipe. Elles ont fini cinquièmes.

 

Chez les féminines, en plus de Louison qui prend la médaille de bronze, Audrey s’est classée 17e, elle a réalisé de bonnes performances en escrime et en natation. Morgane a également été finaliste (24e).

 

X.C  – Audrey a terminé 8e aux Europe et 17e aux Championnats du Monde, elle a réalisé une belle saison. C’est un bon résultat d’ensemble.

 

Décrivez nous ce samedi incroyable avec cette 3e place de Louison en début de journée puis le feu d’artifice avec les garçons, l’enchaînement a été incroyable. Est-ce que vous avez dû intervenir ?

 

X.C – Non, tout est déjà calé, les athlètes on les connaît par cœur, les routines sont les mêmes. Ils savent très bien quel échauffement ils ont à effectuer. Avec Simon, on se répartit les garçons ou les filles. Tout le monde connaît sa place, c’est une mécanique parfaitement huilée qu’on a avec Simon depuis pas mal de temps.

 

Comment vous vous répartissez les garçons et les filles ?

 

X.C – Il y avait trois filles. J’étais plus avec celles que j’ai en pôle donc Louison et Morgane, la répartition se fait facilement. Mais par exemple, je pouvais être au tir alors que Simon était sur le parcours. Ce sont juste les athlètes qui tournent et qui font leurs échauffements et nous on reste en place et on suit ce qui se passe. Après, par rapport aux garçons le choix se fait naturellement, tout dépend de là où on est.

S.C –  Oui, à travers les différentes compétitions qu’on a eues avant avec eux, on a vraiment bâti une équipe solide, on a de bonnes relations, on a tous appris à se connaître.
Xavier et moi, on a trouvé notre place. Comme Xavier travaille avec Louison au quotidien depuis longtemps, il la connaît par cœur donc c’est lui qui va trouver les mots pour l’encourager et lui dire quoi faire. Même si je pense que je trouverais mais ce serait moins naturel, c’est normal qu’il soit avec elle et moi avec les autres. C’est la même chose pour Morgane, Léo est passé par Bordeaux, il a une relation avec Xavier, mais c’est plus au feeling avec les garçons.

J’ai travaillé plus avec Émilien et Melvin, mais j’étais là quand Mathis est sorti de la piscine (lors de la finale) et m’a dit : Là, je peux gagner “. J’ai senti un petit vent de panique juste quelques secondes et j’ai essayé de le rassurer avec quelques mots basiques :De toute façon, tu es prêt, tu sais faire les choses donc fait ce que tu sais faire et tu vas réussir mec “. Il faut parfois employer des mots simples et on les a bien trouvés lors de cette semaine. Avec Xavier, il n’y a pas de problème d’ego, c’est fluide et naturel. Le jour des finales tout s’enchaîne tellement vite que j’ai l’impression de ne pas avoir un gros impact. Le travail a déjà été fait en amont. Le briefing avant est plus important.

X.C – Sur la finale, après l’échauffement général, ce sont plus des petits mots, mais on n’apporte pas grand-chose contrairement au Ranking d’escrime où on est tout le temps derrière eux. Le travail est réalisé précédemment. Il ne s’effectue pas pendant l’heure et demie de la finale. C’est surtout un accompagnement, tout va très vite.

 

Est-ce que vous avez eu le temps de fêter ces résultats ensemble ?

 

X.C – On avait un repas avec tous les coachs le dimanche soir comme il y en a tout le temps après des Championnats du monde.

S.C – La fédération lituanienne a invité l’ensemble des coachs, il y avait le président de la Fédération internationale de Pentathlon Moderne (Dr. Klaus Schormann). Le dimanche soir, on a laissé les athlètes entre eux.

 

Quel avenir voyez-vous pour ce groupe avec le passage pour certains chez les Seniors dès cette saison ?

 

S.C – C’est l’avenir pour les Jeux Olympiques de Los Angeles 2028 (le CIO doit annoncer dans les prochaines semaines si le pentathlon moderne reste au programme olympique en 2028.). Ils savent gagner. On a de très bons jeunes. En plus des juniors, cet été Mathis Issaka-Idé Large a été champion du monde U17 et Etienne Clergeau a pris l’or aux Mondiaux U19. Les juniors qu’on a eu sont prêts, ils doivent continuer à avoir un comportement professionnel pour gravir l’échelon supérieur.

 

Merci Messieurs pour votre disponibilité et encore félicitations pour ces résultats exceptionnels.

Depuis que ces Championnats du Monde se sont terminés. Simon Casse a repris ses activités en tant qu’entraîneur du Pôle Relève d’Aix-en-Provence, Xavier Cugat est le coach du Pôle Relève de Bordeaux.

Sur la photo à la une de l’interview, Simon Casse est tout en haut à gauche et Xavier Cugat est tout en bas à droite. Concernant les athlètes, en haut on retrouve de gauche à droite : Audrey Tchirikhtchian, Morgane Sauvy, Louison Cazaly. Et en bas, on a de gauche à droite : Melvin Perrier, Mathis Rochat, Léo Bories.